Die Walküre - Richard Wagner - Munich - 22 janvier 2018

Die Walküre

Opéra en trois actes.

Première journée de “Der Ring des Nibelungen”

De Richard Wagner
Livret de Richard Wagner


Direction musicale : Kirill Petrenko
Mise en scène : Andreas Kriegenburg
Décors : Harald B. Thor

Siegmund : Simon O’Neil
Hunding: Ain Anger
Wotan : John Lungden
Sieglinde : Anja Kampe
Brünnhilde : Nina Stemme






Représentation du 22 janvier 2018 vue en retransmission en direct depuis l’opéra de Munich.

J'avais entendu (avec ravissement ) les retransmissions audio des Ring dirigés par Kiril Petrenko à Bayreuth avec diverses distributions lors des cycles de la production de Frank Castorf en 2013, 2014 et 2015.
Il était temps qu'il dirige un Ring chez lui à Munich avant de rejoindre la direction de la Philharmonie de Berlin.
Il est donc prévu deux cycles complets en janvier-février et un autre cycle pendant le festival de juillet avec les mêmes, sauf Siegmund qui sera incarné par Jonas Kaufmann. Et le retour a priori, du Wotan prévu, Wolfgang Koch, actuellement souffrant et donc remplacé par John Lungden.

La direction de Kiril Petrenko reste exceptionnelle, je rejoins entièrement tout ce qui a déjà maintes fois, été dit à ce sujet et plus généralement d'ailleurs concernant les qualités exceptionnelles de sa direction dans Wagner, des Meistersinger à Tannhauser (dont on a entendu sa superbe ouverture pendant le deuxième entracte) en l’attente de son prochain Parsifal en juin-juillet.



Le plateau vocal est globalement excellent et puissament aidé par la subtile direction du maestro qui, à son habitude, dirige vraiment une oeuvre lyrique et sait admirablement rendre compte de la complexité de l’écriture musicale wagnérienne pour orchestre et voix, en quelque sorte.

Le Wotan de John Lungden (que j'avais également entendu dans les retransmissions de Bayreuth) confirme son adéquation au rôle : il le chante avec une sensibilité, un sens des nuances (parfaitement harmonisé à la direction Petrenko) exceptionnel et il le joue magnifiquement bien. Il transcende son personnage et on finit par ne plus le quitter des yeux...fascinant chanteur-acteur...



Anja Kampe est sans doute une des meilleurs Sieglinde actuelles, une Sieglinde qui a du caractère malgré l'autorité de son mari, qui se rebelle, exaltée par la découverte de sa gémellité, désespérée de la mort de Siegmund, elle incarne elle aussi avec talent son personnage. Elle vous captive et vous rend complice de son tragique destin, tout comme de sa touchante exaltation quand elle découvre l’identité du vagabond envers lequel elle ressent tant d’étranges attirances.

Ekatérina Gubanova se sort magnifiquement du court rôle de Fricka, elle vampe littéralement Wotan et impose son point de vue avec culot. Elle garde l’élégance naturelle qu’elle a toujours sur scène, sa jeunesse et sa belle silhouette ne sont pas les plus traditionnelles représentations de Fricka mais, rompant intelligemment avec les lieux communs en la matière, elle libre une prestation dont on se souvient avec plaisir.



J’émettrai quelques réserves sur le Siegmund un peu fatigué de Simon O'Neil, inégal quoique globalement tellement investi qu'on oublie parfois ses quelques insuffisances vocales et son interprétation discutable du personnage sur le plan musical. Mais son chant et son style ne varient pas suffisamment entre un “Wälse” triomphant comme il se doit et un “Winterstürme” trop peu lyrique, ou un “Nothung” pas suffisamment sonore. On attendra Kaufmann pour juger de l’ensemble avec un Siegmund subtil.




Enfin le Hunding de Ain Anger a la noirceur recherchée et une belle voix de basse tout à fait adéquate. Joli jeu de scène également.




Les Walkyries sont globalement très bonnes ; on remarque évidemment Okka Von Damerau qu’on a vue souvent à Munich dans une série impressionnante de rôles qu’elle domine toujours avec une aisance confondante.

Reste Nina Stemme qu'on ne présente plus dans son rôle fétiche, celui de Brünnhilde. Effectivement elle a parfois un vibrato persistant mais dans le style du rôle ce n'est pas très gênant. Elle fait surtout preuve d'un investissement sans faille, sans faiblir une seule seconde et ne serait-ce que pour le fabuleux acte 3, cette Walküre vaudrait le déplacement.
Moins imposante physiquement que nombre de Walküre historiques, elle a pour elle à l’inverse, une allure de jeune fille restée tendre, naïve et décidée dans ses choix, qui fonce pour défendre ses convictions sans mesurer ce qu’il lui en coûtera. L’affrontement “je t’aime moi non plus” entre elle et son père n’en sont que plus émouvants et déchirants.

On s'habitue à la mise en scène (déjà ancienne) de Kriegenbuch sans grande imagination, aux décors assez laids, qui joue surtout sur les objets symboles (l'épée, la lance), simplifie les décors pour chaque scène (table avec victuailles et gros arbre avec l'épée à l'acte 1), bureau de ministre de Wotan au début de l'acte 2 puis corps morts de guerriers sur des lances à la fin de l'acte 2, début acte 3, rien - le plateau nu- pour le final, feu autour de Brünnhilde pour l'épilogue. Des figurants apparaissent régulièrement sur le plateau dont le fameux ballet moderne juste avant le début de l'acte 3 qui est applaudi d'ailleurs, juste avant que la plus célèbre chevauchée de tous les opéras commence.
La mise en scène joue beaucoup sur la lumière avec beaucoup d'effets (vert lors de la première rencontre des jumeaux, rouge quand Siegmund s'empare de l'épée, blanc lors de la confrontation Fricka-Wotan et à nouveau avec la scène entre Wotan et sa fille etc et.

Enfin les costumes et les perruques ont aussi leur sens : tous les dieux ont les cheveux blancs (les Walkyries, Wotan et Fricka).
Affublée de longs cheveux blancs, d'une robe lamée argent assez "sac" et d'une gabardine militaire, la pauvre Nina Stemme est la moins bien lotie.

A noter : c'est Nicolas Bachler, le directeur du BSO, qui présente lui-même cette Walküre acte après acte. Puis au premier entracte, il présente les productions qui suivent : la reprise de la Favorite et la nouvelle production des Vêpres Siciliennes (qui sera retransmise en livestream). Au deuxième acte après l'ouverture de Tannhauser, c'est la nouvelle production de Parsifal qui est présentée, notamment par Jonas Kaufmann qui reprend le rôle titre.

Les petits plus du blog


La Walkyrie au cinéma : 

La référence à l'opéra de Wagner la plus célèbre du cinéma est l'utilisation de l'air de la Chevauchée des Walkyries dans le film "Apocalypse now" de Coppola , utilisé par les militaires américains qui branchaient leurs hauts-parleurs sur les hélicoptères de combat.



Mais Tarantino dans "Django Unchained" utilise à son tour le mythe de Brünhilde : le docteur Schultz d'origine allemande explique à Django, l'esclave noir, l'histoire de Brünnhilde à propos de l'étrange prénom d'une esclave noire dont Django est amoureux et qui s'appelle Broomhilda

Extraits de l'enregistrement du Mariinsky sous la direction de Valery Gergiev

Acte scène 1, Anja Kampe, Jonas Kaufmann.





Extrait du DVD du MET


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