Récital Florian Sempey - Elephant Paname - 18 juin 2018


Récital Florian Sempey 




"l'Instant lyrique" à l'Elephant Paname - Paris.

Lundi 18 juin 2018

Florian Sempey, baryton
Antoine Palloc, piano

Programme
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
La Finta giardiniera « Con un vezzo all’italiana »
Cosi fan tutte « Rivolgete a lui lo guardo »
Adagio de la sonate K. 332. (piano seul)
Le Nozze di Figaro « Hai gia vinta la causa »

Joseph Haydn (1732-1809)
Acide e Galatea «Tergi vezzosi rai »

Gioachino Rossini (1792-1868)
La Scala di seta « Amore dolcemente »
Mathilde di Shabran « Intanto Armenia »
Gammes, Des montées et des décentes (piano seul)
Le Comte Ory « Dans ce lieu solitaire »
Il Barbiere di Seviglia « Largo al factotum »

Bis :
L’air du Bébé de Rossini
L’air du Génie d’Aladdin
Paysages

Florian Sempey, jeune baryton français, se définit d'abord comme chanteur mozartio-rossinien, et le choix de ce programme reflète parfaitement son appétence (et son talent) pour les exercices de vocalises acrobatiques et de bel canto syllabique ultra rapide.

Outre une voix très large, très profonde et très souple, qui se projette si bien qu'elle sature un peu l'espace étoilé de l'Elephant Paname, et passe mieux en deuxième partie quand la climatisation refroidit un peu l'atmosphère ce qui permet une meilleure acoustique, Sempey a pour lui une présence sur scène incomparable.

Il n'est jamais aussi à l'aise que dans la farce, le comique très poussé, où il joue de toutes ses qualités : la précision de la partition où il ne "savonne" jamais aucun arpège, respectant scrupuleusement, malgré la difficulté de réalisation, les staccato comme les legato (il est hors de question que j'oublie la moindre note, dit-il en riant, je me ferais aussitôt assassiner), la virtuosité des airs, la diction fabuleuse (en italien comme en français et en anglais d'ailleurs, c'est lié à sa technique de chant), et sa capacité à représenter par ses gestes, ses mimiques et avec ses mains, le personnage qu'il incarne, même le temps d'un air...

C'est ce qu'on appelle (sans aucune connotation péjorative) une bête de scène.
Il pourrait faire le "show" y compris dans des numéros de variété avec ses airs d'opéra, à une heure de grande écoute sans ennuyer un public qui serait rapidement conquis par la fougue du jeune chanteur.

J'avais déjà entendu ses "Mozart" de Cosi et des Noces (quel séduisant Figaro, quelle maitrise des "rires" de la partie), c'était bien mais un peu fort pour la salle, il est (à mon sens) meilleur dans Rossini, où je l'ai trouvé carrément fantastique.
Entre les deux il y a eu quand même le Joseph Haydn, ce «Tergi vezzosi rai » tiré de "Acide e Galatea" qui lui a permis de finir très brillamment une première partie et s'autoriser une petite pause pendant laquelle les organisateurs ont mis la climatisation dans cette salle surchauffée.

J'ai cru comprendre qu'il n'avait jamais encore chanté dans La Scala di seta (un « Amore dolcemente » incroyablement négocié) ni dans Mathilde di Shabran ( ah ce « Intanto Armenia » à vous damner...). Par contre le Barbier est désormais une de ses cartes de visite. Il a été invité à Pesaro, le festival Rossini, l'an dernier. 
J'espère que sa carrière se poursuivra dans ce type de rôle où il a vraiment quelque chose à apporter par son dynamisme allié à la qualité de son chant.

On pourra lui reprocher d'en faire de trop (mes voisins l'ont très peu applaudi, manifestement agacés par ses excès) mais s'il parvient à canaliser (un peu) son trop-plein d'énergie, il devrait très brillamment poursuivre une carrière déjà bien engagée. C'est finalement assez bluffant de voir que, malgré une gestuelle et des mimiques très "clownesques", il est aussi précis dans le moindre détail de son chant.

Et proposer en "bis", le bébé de Rossini en dit long sur l'esprit provocateur voire facétieux que peut avoir notre Florian.
Mais il assume.
Les deux “bis” suivants, généreusement octroyés, montraient deux facettes très différentes de l'artiste : l'air du génie de l'Aladdin de Walt Disney d'abord, d'où ma remarque sur la maitrise de l'anglais, où il démontrait une stupéfiante qualité de chanteur de music hall tant l'air était magnifiquement interprété, à tel point que par effet magique on avait l'impression de voir :



Il terminait ce très brillant récital par la chanson « Paysage » de Reynaldo Hahn dans un tout autre style, celui du lied, avec un crescendo en longue note filée sur le final (waouh...)

Là, nous aurions vécu, le cœur tout près du cœur,
Oublieux, oubliés, et notre amour, mignonne,
Eût grandi dans ce coin de la terre bretonne, (crescendo)
La terre où rien ne meurt.(forte puis diminuendo sur le dernier mot...)


Il chante (et joue car quel acteur fabuleux) actuellement Malatesta dans Don Pasquale à Garnier. Il sera le Barbier à Orange cet été puis le comte de Nevers dans les Huguenots à la rentrée. Je l’ai souvent entendu (Pappageno dans la Flûte, Figaro dans les Noces et dans le Barbier de Séville à Bastille puis au TCE pour ce dernier, la Jacquerie de Lalo en version concert à l’auditorium de Radio France, Malatesta dans Don Pasquale à Garnier, dans Die Fledermaus à l’opéra Comique également et j’en oublie sans doute. Il a déjà interprété des Lieder de Mahler et de Schubert et c'est un genre qu'il aime également. C’est un jeune talent à ne surtout pas perdre de vue !

Son site :




Le Barbier au Grand Echiquier


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