Theodora, l'oratorio de Handel, Il Pomo d'Oro et une sublime Joyce DiDonato, très belle distribution et soirée réussi
Theodora
Oratorio – 1750 –
Soirée du 22 novembre 2021 au Théâtre des Champs Elysées, dans le cadre d’une tournée Theodora, le "Handel Tour" les 18/20/22/24/26 Novembre respectivement à Teater an der Wien, La Scala, TCE, Philharmonie du Luxembourg, et Essen.)
Lisette Oropesa | Theodora
Joyce DiDonato | Irene
Michael Spyres | Septimius
John Chest | Valens
Paul-Antoine Bénos-Djian | Didymus
Massimo Lombardi | Le Messager
Maxim Emelyanychev | direction
Orchestre et chœur Il Pomo d'Oro
En comparant au Theodora vu au TCE en 2015 (William Christie), j'aurais tendance à trouver la direction d'Emelyanychev plus inégale, moins maitrisée pour ce long oratorio qui repose sur la qualité des choeurs omniprésents et celle des solistes à commencer par le contre-ténor, figure centrale de l'oeuvre musicale, puis les personnages féminins à part égale.
C'est une oeuvre que je trouve musicalement envoûtante et magnifique, composée surtout d'arias avec de multiples reprises où les plus grands artistes peuvent vraiment donner la mesure de leur talent dans le baroque. La langue anglaise n'est pas forcément la plus facile à maitriser dans le cadre de ces airs souvent périlleux, même pour un cast américain comme celui d'hier soir. Il est beaucoup plus important d'avoir la maitrise du style musical de Handel et de ce point de vue, sans surprise, c'est Joyce DiDonato, habituée du compositeur, qui remporte de loin la palme du beau chant, parfaitement adéquat à la partition, nous livrant par exemple un ""Lord, to Thee each night and day"" qu'on aurait volontiers "bissé" tant il était émouvant, juste, incroyable sur le plan technique, avec des pianissimo a capella comme des murmures parfaitement audibles dans la salle scotchée et totalement silencieuse, qui vous touchaient droit au coeur.
En 2015, le rôle de Dydime était assuré par un Jaroussky très au fait lui aussi de ce répertoire. Hier soir, nous découvrions en "live" Paul-Antoine Bénos-Djian, déjà remarqué dans l'enregistrement récent du Mitridate de Mozart sous la direction de Minkowski. C'est un artiste à fleur de peau, qui attire aussitôt l'attention sans toujours convaincre mais avec un très bel investissement très touchant. Il reste un peu de travail avant de dominer les arcanes du chant handelien, mais il a la volonté et le sens de l'incarnation qui touche le spectateur. Personnellement je l'ai beaucoup apprécié même si j'ai noté diverses réactions dans le public (il faut dire que j'ai même entendu des spectateurs se demander pourquoi Spyres n'avait pas le rôle principal).
J'ai été un tout petit moins convaincue par la Théodora de Lisette Oropesa, voix moins brillante qu'à l'accoutumée, là aussi dans un répertoire qui n'est pas forcément très habituel chez elle (me semble-t-il). Elle s'est montrée cependant à la hauteur des plus beaux airs de la partition comme "With darkness deep" et son duo (à pleurer d'émotion...) avec Antoine Bénos-Djian,"To thee, thou glorious son of worth" a été à juste titre très applaudi.
Michael Spyres dans le rôle de Septimus, n'a pas la partie facile : ses airs sont moins mélodieux que ceux de ses partenaires, certains sont même très difficiles à négocier sans être particulièrement valorisants mais le ténor a les ressources suffisantes pour en venir à bout avec brio et talent. Très belle prestation globale.
John Chest est un Valens inégal, un peu terne en début de soirée mais très brillant dans son dernier air et il faut saluer la courte prestation du messager, Massimo Lombardi, membre des choeurs.
D'une manière générale, si j'ai trouvé la direction inégale (parfois trop lente, parfois absolument géniale de précision et d'allant), je ne peux que distribuer des éloges aux instrumentistes de Il Pomo d'Oro et à son magnifique choeur, absolument central dans l'oratorio qui nous a, avec JDD, à mon sens, offert les plus belles pages musicales....
Belle soirée franchement dans une salle comble et enthousiaste.
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