I Gemelli, Emiliano Gonzalez Toro et Zachary Wilder pour une superbe soirée sous le signe des émotions et des contrastes.

Concert Emiliano Gonzalez Toro, Zachary Wilder, I Gemelli autour du CD "a room of mirrors". 

 


Paris, Salle Gaveau - 24 mars 2022

 

Damigella tutta bella (Vincenzo Castelani)

Dialogo della rosa (Sigismondo D’india)

Dove ten vai (Francesco Turini)

La vecchia innamorata (Biagio Marini)

Folia echa para mi señora (Andrea Falconieri)

Se l’aura spira (Andrea Falconieri)

Mai non disciolgasi, ciaccona (Annibale Gregori)

Piangono al pianger mio (Sigismondo D’india)

Sonata Quarta (Dario Castello)

Langue al vostro languir (Sigismondo D’india)

Giunto alla tomba (Sigismondo D’india)

Quella che tanto (Bellerofonte Castaldi)

Intenerite voi (Angelo Notari)

Folgori Giove (Galeazzo Sabbatini)

 

Superbe soirée d'un ensemble baroque qui sonne juste et bien et exprime toute la richesse de ce XVIIème siècle italien avec émotion, humour, colère, douleur, amour.

L'ensemble I Gemelli est une très belle formation baroque composée de quelques instrumentistes de grande qualité qui sont bien davantage que des accompagnateurs et participent de manière pleine et entière à ces joutes musicales entre instruments, entre instruments et voix, qu'illustre ce magnifique (et souvent méconnu) répertoire de chansons du "Seicento" italien. 

Quand les "voix" sont celles de deux ténors, Emiliano Gonzalez Toro qu'on ne présente plus et qui est le deus ex machina de toute cette entreprise artistique autour de cette période qu'il nous fait régulièrement découvrir ou re-découvrir, et son complice pour cette soirée (et l'enregistrement de référence), Zachary Wilder, le duo/duel, la "joute", l'effet de miroir recherché, est tout simplement fascinant et nous accroche de la première à la dernière note.

Le concert est tout à la fois d'une grande probité professionnelle par l'extrême qualité de ses interprètes dans leur ensemble et bon enfant dans sa forme et la convivialité que Emiliano Gonzalez Toro et ses amis savent créer avec un public plutot jeune et très enthousiaste. Les "morceaux" sont présentés par chacun des deux ténors mais aussi par le premier violon, par deux ou par trois, pour guider le spectateur et l'entrainer dans ce tourbillon étourdissant de virtuosité baroque entre le jeu, l'humour grinçant et la gravité selon les airs.

Les deux voix révèlent des timbres suffisamment différents pour permettre un bel alliage, celui qui découle de ces différences capables de se fondre dans un vrai duo, qu'il soit direct (duos) ou indirect (succession de deux airs interprétés par un ténor puis l'autre). Et la composition du programme à l'instar de la grande richesse de l'enregistrement, est très spectaculaire par ses contrastes et la véritable revue de tous les styles de cette époque bien plus riche qu'on ne le suppose généralement tant qu'on n'a pas exploré ces petites pépites.

Dès l'ouverture du concert où Emiliano Gonzalez Toro évoque avec émotion la situation dans les pays où les théâtres ont fermé et les musiciens se sont tus, se succèdent deux morceaux joyeux et contrastés, la Damigella tutta bella de Vincenzo Castelani et le "Dialogo della rosa" de Sigismondo D’india, véritable pièce d'orfèvrerie à la délicate interprétation croisée.

Et puis il y a les moments d'humour où la petite pièce est jouée par son interprète comme une véritable petite scènette : citons tout particulièrement  la « Viecchia innamorata » (la vieille amoureuse) de Biago Marini, où Zachary Wilder incarne successivement tous les rôles de cette petite merveille de caricature de l'amour et des désirs, qui est à elle seule, un petit chef d'oeuvre.

Les déplorations, ces moments musicaux où l'on manifeste la douleur, parfaitement maitrisées par les deux ténors comme par les instruments qui ont leurs parties musicales intenses et émouvantes, atteint des sommets avec le déchirant Giunto alla tomba de Sigismondo D’india, précédé  de son Langue al vostro languir. Moment de gravité et d'émotion intense dans la salle que l'ensemble de la formation a totalement captivé avec un talent remarquable. 

Dire que, pour certains, le baroque est parfois ennuyeux. Disons le franchement, ce concert par le choix des morceaux, le sens donné à sa progression, la qualité et la vitalité des interprètes, est exactement l'inverse : une passionnante aventure que les curieux pourront prolonger par l'écoute du CD complet. 

Tournés vers l'avenir et les prochaines prestations de l'ensemble, les deux ténors ont conclu par un bis d'une grande maitrise là aussi, extrait du Couronnement de Poppée de Monteverdi.

A suivre... de très près !


Emiliano Gonzalez Toro, ténor

Zachary Wilder, ténor

Stéphanie Paulet, violon

Leonord De Lera, violon

Louise Pierrard, viole de gambe

Julien Léonard, viole de gambe

Annabelle Luis, violoncelle

Marie-Domicile Murez, harpe

Vincent Flückiger, archiluth

Nacho Laguna, théorbe et guitare baroque

Clement Geoffroy, clavecin et orgue

 

Ensemble "I Gemelli" 

Sous la direction de Emiliano Gonzalez Toro 


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