Andrea Chénier - Munich 31 juillet 2017

Munich 31 juillet, dernier jour du festival d'été 2017

Avant de revenir sur une Favorite (Donizetti) surprenante mais de haute tenue et des Contes d'Hoffmann (Offenbach) déconcertants, vus les 29 et 30 juillet à Munich, petit retour sur le dernier Andrea Chénier de la saison, le 31 juillet, à la "maison" avec le couple star que forment Anja Harteros et Jonas Kaufmann qui nous offert, encore une fois, un épisode grandiose d'opéra et un exemple de l'efficacité dramatique et émotionnelle de leur formidable entente.

Ce fut un magnifique feu d'artifice final pour cette saison qui s'achève en beauté après un festival d'été d'une richesse en stars, en productions, en chefs d'orchestre, en oeuvres variées inégalée.

On pouvait opter pour la semaine où figurait la fabuleuse Forza del Destino (Verdi) où Kaufmann et Harteros continuent d'accomplir le miracle qu'ils avaient perpétré devant nos yeux ébahis un certain 5 janvier 2013, l'un de mes souvenirs les plus forts à l'opéra. Même si cet été c'était sans Ludovic Tézier.

J'ai choisi cette dernière semaine pour ce tir groupé de rêve : Andrea Chénier toujours avec Harteros et Kaufmann, la Favorite avec le trio Garança, Kwiecen, Polenzani, et les Contes d'Hoffmann avec Damrau et Spyres, puis à nouveau Andrea Chénier en bouquet final grandiose et fêté comme il se doit.


Concernant la mise en scène de cet Andrea Chénier décidément très réussi, l'orchestre, les choeurs et les rôles secondaires, je vous renvoie à mon compte-rendu du 28 Juillet.


L'ensemble fonctionne toujours aussi bien et le spectacle, très impressionnant dans cette vision noire et hyper réaliste de la Révolution Française, ménage une parfaite tensions dramatique tout comme les décors et les artistes bougent dans un tempo, parfaitement rodé en phase totale avec la musique dans un crescendo d'émotions impressionnant.

Jonas Kaufmann est toujours aussi déterminé à interpréter un Chénier en colère comme il l'avait fait dès sa première composition à Londres. Il campe un impressionnant et puissant Chénier refusant toute facilité "romantique" pour incarner ce personnage sans la moindre concession. Il a été magnifique à son habitude malgré un léger voile à deux reprises sur sa voix qu'il a surmonté rapidement. Splendide et émouvante prestation globale qu'il faut saluer une fois encore, vaillance dans le chant et aigus claironnants sans faille, notes filées puis longuement tenues, on a là comme d'habitude du grand Chénier. Et peut-être plus encore que les autres fois, ce refus de Chénier de se résigner à mourir, ce dernier chant à la vie poignant juste avant qu'il ne se jette au sol dans son cachot sombre, alors que telle la lumière, Maddalena-Harteros apparait pour le plus beau final qu'on puisse imaginer.

Anja Harteros, elle, a été incontestablement la plus souveraine des trois ce dernier soir, voix magnifique, aigus délicieusement négociés pour une émotion maximale, incarnation si crédible des évolutions de cette Maddalena encore jeune fille joueuse au début de l'opéra et femme blessée et passionnée quand elle meurt pour partir avec Chénier. Sa Mama morta reste, je pense, inégalée parmi ses contemporaines. On verra l'interprétation qu'en fera Anna Netrebko très attendue dans ce rôle également, qu'on pourra entendre à la Scala à partir du 7 décembre prochain avec un Andrea Chénier beaucoup moins excitant que Jonas Kaufmann, malheureusement.

Petite déception par contre avec l'annulation du baryton Luca Salsi dont j'avais dit le plus grand bien suite à la séance du 28 juillet et qui est tombé malade à la veille de la dernière, cédant donc sa place dans le rôle de Carlo Gérard à Ambroglio Maestri, qui a des qualités vocales certaines mais reste malgré tout un peu "entier", manquant singulièrement des subtilités que Salsi avait su donner au rôle.
Son "jeu" de scène est également beaucoup plus sommaire et on ne retrouve pas tout à fait la parfaite entente entre les trois héros de l'opéra qui m'avait comblée le 28.

C'est la vie et les aléas de santé des chanteurs très sollicités dans cette fin de saison où le temps n'est pas toujours clément pour les gorges (orages, refroidissement puis retour de la canicule ne cessent d'alterner à Munich).

Le Bayerische Staatsoper offrait aux mélomanes absents de la salle, la possibilité de suivre en direct les saluts au final, vus depuis les coulisses.
Amusante vidéo qui rend compte de l'atmosphère toujours exceptionnelle du public quand il a devant lui d'aussi grands artistes. Vingt minutes d'applaudissements ininterrompus.
Jonas Kaufmann et Anja Harteros, interviewés "derrière" le rideau, portant encore costumes et "blessures" de scène, ont confié leurs projets immédiats.

Jonas Kaufmann part à Sydney pour trois Parsifal en Août, Anja Harteros a des concerts, un Lohengrin et une Tosca à la rentrées avant de reprendre Andrea Chénier avec Jonas Kaufmann début décembre à nouveau à Munich.

La video de Munich, saluts et applaudissements, 31 juillet
https://www.facebook.com/baystaatsoper/videos/10155560632148794/

A propos du Parsifal à Sydney pour lequel Jonas Kaufmann est parti ce matin, 1er Août, je vous recommande cet interview faite par un journal australien pendant le Lohengrin de Kaufmann à Paris, où le ténor revient sur ses projets, notamment son futur Tristan et donne sa philosophie quant aux rôles qu'il veut chanter dans l'avenir : il n'abandonne que les rôles qui ne sont plus dans sa voix comme le répertoire de Rossini ou même Cosi Fan Tutte mais il recommencerait bien une Flûte enchantée" (Tamino)...

http://www.limelightmagazine.com.au/features/jonas-kaufmann-wagner-me



Jonas Kaufmann - photo Josiane Mouron

Luca Salsi, Jonas Kaufmann, Anja Harteros



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