Der Ring des Nibelungen/L'or du Rhin - Opéra de Munich - 20 juillet 2018


Der Ring des Nibelungen

Richard Wagner

Festival d'été de l'opéra de Munich - 20-22-24-27 juillet.
Reprise de la production de Andreas Kriegenburg
Direction Musicale : Kiril Petrenko


PrologueDas Rheingold

Wotan : Wolfgang Koch
Donner : Markus Eiche
Froh : Dean Power
Loge : Norbert Ernst
Alberich : John Lundgren
Mime : Wolfgang Ablinger-Sperrhacke
Fasolt : Alexander Tsymbalyuk
Fafner : Ain Anger
Fricka : Ekaterina Gubanova
Freia : Golda Schultz
Erda : Okka von der Damerau
Woglinde : Hanna-Elisabeth Müller
Wellgunde : Rachael Wilson
Floßhilde : Jennifer Johnston



Comme il n'y a pas de "Ring" cette année à Bayreuth, celui de Munich (qui réunit tout à la fois l'un des meilleurs chefs wagnériens du moment et une distribution prestigieuse jusque dans les plus petits rôles), a été pris d'assaut dès l'ouverture des billets.
Deux cycles avaient lieu en janvier et février. Celui-ci est le troisième de la même série.

Brillant début pour ce Ring et son prologue "Das Rheingold" (l'Or du Rhin) avec l'agréable surprise d'une mise en scène très lisible qui suit scrupuleusement le déroulement de l'histoire, évoquant de manière claire sans être trop appuyée, les différents lieux, différentes situation de cette introduction.

Et comme souvent à Munich, tout est si fluide que cela semble totalement naturel : l'eau du Rhin, ses ondulations sont en phase avec la baguette magique de Kiril Petrenko tandis que sur la scène les danseurs miment ses doux mouvements. les géants jumeaux sur leurs gigantesques blocs, qui emmènent Freia au bout d'une corde vers le haut d'un plateau de plus en plus incliné où des lettres géantes façon star wars, annoncent la quête de Loge et le départ de Wotan et de Loge sous terre (changement de lumières, le feu rougeoie, d'immenses forges crachent de temps en temps leurs flammes, dans le fond (et le haut) de la scène, on ramène l'or extrait en un incessant ballet de silhouettes courbées sous la tâche. Il faudra grimper littéralement la paroi presque vertical du plateau pour se hisser jusqu'au sommet du Walhalla.

Costumes et allure des personnages est également très typée  : les filles du Rhin en trois soeurs jumelles robes vert d'eau chevelures blondes, Fricka, Freia, Wotan (en noir) Loge (en rouge) ont les cheveux blancs, les géants Fasolt et Fafner de longs manteaux bleus absolument semblables dans une insistance de la gémellité du Ring très marquée, le forgeron Mime a un immense tablier de cuir et Alberich est un peu le double jeune aux cheveux bruns du dieu Wotan.

L'une des raisons de l'attrait de ce Ring au delà de cette mise en scène, inaugurée en 2012 à Munich par le directeur musical d'alors Kent Nagano, c'était bien sûr la direction de Kiril Petrenko. J'avais remarqué sa lecture "chambriste" et très colorée du Ring dès ses débuts à Bayreuth et les retransmissions assurées par France Musique à l'époque que j'écoutais toujours quasi-religieusement. Sans rien voir, juste en écoutant, c'était littéralement magique, comme si on pouvait (encore) finalement redécouvrir cette exceptionnelle partition, qui, dès Rheingold, présente tous les thèmes qui vont accompagner les personnages, donnent déjà quelques uns qui campent les situations, évoquent habilement la suite du Ring et de la malédiction.

Mais c'est aussi la beauté du plateau vocal et son adéquation à la direction du maestro qui emportent l'adhésion immédiate (chant tout en nuances, héroïque quand il faut l'être mais sans excès pour garder tout son sens aux relations complexes entre les personnages incarnées par leur chant.

L' Alberich de John Lundgren méritait sans aucun doute l'ovation qui lui a été faite tant il est brillantissime de tous les points de vue et il est vrai qu'il faisait un peu d'ombre au Wotan moins éclatant mais très bien chanté de Wolfgang Koch. Il avait été Wotan en janvier en remplacement de Koch ce qui avait donné un affrontement avec Brünnhilde d'anthologie dans la Walküre (et j'avoue que dimanche, s'il prenait le rôle de Wotan, on aurait un choc de titans fort attirant...). Le Loge de Norbert Ernst est grinçant à souhait, parfaitement dans son rôle et dans sa peau, il virevolte sur la scène avec une voix un tantinet grinçante et parfaite dans l'incarnation. Nous nous offrons le luxe d'avoir en Fasolt, Alexander Tsymbalyuk (Boris Godounov remarqué à Paris Bastille récemment) et en Fafner, Ain Anger, qui fut lui, Pimène tout aussi remarquable dans le même Boris. Bref du grand luxe comme rarement dans ces deux rôles. Splendide Fricka d'Ekaterina Gubanova (déjà entendue dans ce rôle d'ailleurs), délicieuse Freia de Golda Schultz (l'une des filles fleurs du Parsifal récent) et magnifique Erda d' Okka von der Damerau (très ovationnée également d'ailleurs) qui chante avec un autorité et une classe scotchante. Très bons Donner de Markus Eiche, Froh de Dean Power et Mime de Wolfgang Ablinger-Sperrhacke (je ne connaissais pas ce dernier mais il a une belle présence, c'est un habitué du rôle d'ailleurs). Enfin, cerise sur le gâteau, les belles Woglinde de Hanna-Elisabeth Müller (Zdenka dans Arabella début juillet), Wellgunde de Rachael Wilson et (avec un léger bémol),de Floßhilde de Jennifer Johnston ouvraient et fermaient le bal avec un talent romantique de naïades insouciantes puis désespérées d'avoir perdu l'or,  très réussi.


Un beau début qui promet pour la suite....

Nous sommes bien embarqués dans la grande aventure du Ring.



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