Une "Dame Blanche" très vitaminée et charmante à l'Opéra de Rennes. Représentation du 11 décembre, à voir absolument.

La Dame Blanche

François-Adrien Boieldieu

Opéra-comique en trois actes sur un livret d’Eugène Scribe, d’après Walter Scott.

 

Séance du 11 décembre 2020, sans public, Opéra de Rennes, retransmission en direct.

 

Nicolas Simon : Direction musicale

Louise Vignaud : Mise en scène

 

Sahy Ratia : Georges

Fabien Hyon : Dikson

Sandrine Buendia : Jenny

Yannis François : Gaveston

Caroline Jestaedt : Anna

Majdouline Zerari : Marguerite

Ronan Airault : Mac-Irton, juge de paix

Costumes réalisés par l’atelier de l’Opéra de Rennes

Décor réalisé par l’atelier des 2 Scènes - Scène nationale de Besançon

 

Par ces temps de disette lyrique qui ne semblent pas vouloir s'éclaircir de sitôt, hélas malgré l'évidente sécurité des salles de spectacles, c'est un plaisir de pouvoir dire malgré tout haut et fort : Oui c'est une belle réussite que cette représentation de la Dame Blanche, hélas, sans public réalisée et tournée dans l'Opéra de Rennes avec une vraie troupe de jeunes chanteurs. Difficile évidemment d'imaginer ce que donnerait ce petit monde "en vrai" mais leur complicité et leur entente sur le plateau fait merveille.

L'orchestre m'a semblé assez restreint mais sonnant très bien avec un chef (Nicolas Simon) qui porte lui-même des plumes d'oiseau, et qui dirige avec beaucoup d'allant. Les solos de harpe qui accompagnent l'arrivée de la Dame Blanche à chacune de ses apparitions sont également de toute beauté.

Décors simples voire stylisés mais qui évoquent bien les lieux décrits dans l'oeuvre (essentiellement le village puis le château), de beaux éclairages et surtout des costumes/coiffes/maquillage, étonnants et très réussis qui assimilent les personnages au monde animal.

On pourra effectivement trouver les dialogues parlés un peu trop modernisés (j'en ai ras la patate...), et donc parfois gênant par leur ultra modernité, mais ils présentent l'avantage de rendre l'oeuvre très accessible à un jeune public en particulier, énormément d'explications étant fournies au travers de ces paroles.

Reste le charme de cette oeuvre sans prétention, très équilibrée musicalement et qui sait faire varier les "arias" gaies ou nostalgiques des solistes avec de nombreux ensembles à deux, trois, quatre, qui sont de très grande tenue musicale.

Le plateau vocal est superbe et c'est sans doute ce qui m'a le plus impressionnée (avec les réserves qu'il faudra systématiquement rappeler quand même, quand personne n'a pu voir et entendre les artistes en salle) : le jeune ténor malgache Sahy Ratia (Georges), révélation classique 2019 des talents ADAMI), qui n'a pas trente ans, est très prometteur de tous les points de vue : aisance vocale et scénique, belle présence dans ce rôle de prince qui s'ignore, et est prêt à tout par amour. Le timbre est suave, les vocalises soignées tout en paraissant totalement naturelles, la diction est parfaite et son "Georges" est une véritable merveille.

Fabien Hyon campe un Dikson un peu veule, pas très courageux mais très généreux avec beaucoup de talents également et ses duos avec sa "femme" à la scène, Sandrine Buendia  (Jenny) qui ouvre la première scène, nous mettent immédiatement dans une incontestable ambiance de qualité vocale.

A remarquer également le beau et grand  Gaveston de Yannis François, baryton guadeloupéen qui a commencé comme danseur et en garde un corps sculpté et une grâce étonnante dans ses mouvements qui en font un "méchant" diablement séduisant et fort bien chantant. On reste ainsi dans le conte de fées et de fantômes pour gentils enfants sages qui marche très bien il faut le dire...

Caroline Jestaedt est une charmante Anna (et la Dame Blanche), qui manque peut-être un tout petit peu de "mystère" dans ses prestations "dame blanche" mais dont la fraicheur et la jeunesse emportent rapidement l'adhésion.

Voix superbe, timbre de bronze et solide technique pour pour Majdouline Zerari (Marguerite) qu'on peine un peu à imaginer en vieille femme mais qui nous offre une si belle partition qu'on en oublie sa belle jeunesse. Là aussi beaucoup de talent pour une mezzo encore peu connue.

Et n'oublions pas Ronan Airault qui fait beaucoup rire en juge de paix et tient parfaitement bien son rôle.

Depuis que l'Opéra Comique a exhumé cette oeuvre légère et divertissante des cartons où elle dormait, cette reprise dans une autre mise en scène moins d'un an après, démontre, s'il en étant besoin, l'actualité d'un patrimoine lyrique considérable qui reste à ré-exploiter.

Souhaitons à cette jeune troupe de pouvoir faire une tournée en vrai, avec un public.

Rien de tel que cette interaction magique du spectacle vivant....


A revoir ici :

https://www.youtube.com/watch?v=tDC0Avj6uWs&feature=emb_logo

 

Commentaires

Les plus lus....

Magnifique « Turandot » à Vienne : le triomphe d’un couple, Asmik Grigorian et Jonas Kaufmann et d’un metteur en scène, Claus Guth

Salomé - Richard Strauss - Vienne le 20/09/2017

"Aida" mise en scène par Michieletto au festival de Munich : les horreurs de la guerre plutôt que le faste de la victoire