Don Pasquale - Donizetti - Opéra de Paris Garnier- 11 juin 2018
Don Pasquale
De Gaetano
Donizetti
Direction
musicale : Evelino Pidò
Mise en
scène : Damiano Michieletto
Chef des
Choeurs : Alessandro Di Stefano
Don Pasquale
(vieux barbon célibataire) : Michele Pertusi
Dottor
Malatesta (son docteur) : Florian Sempey
Norina (jeune
veuve) : Nadine Sierra
Ernesto (neveu
de Malatesta): Lawrence Brownlee
Un notaire :
Frédéric Guieu
Décors :
Paolo Fantin
Costumes :
Agostino Cavalca
Lumières :
Alessandro Carletti
Vidéo :
rocafilm
Coproduction
avec le Royal Opera House, Covent Garden, Londres et le Teatro Massimo, Palerme.
Retransmission
en direct au cinéma (Viva l’Opéra), le 19 juin 2018.
Palais
Garnier – séance du 11 juin 2018
Quand
Donizetti écrit Don Pasquale il a déjà composé des dizaines d’opéras
célèbres. Pour cette commande d’un opéra buffa,
Donizetti piochera dans diverses de ses partitions, notamment l’Elisir d’Amore et
la Favorite (elle-même tirée de la partition d’un autre opéra l’Ange de
Nisida).
Musicalement
et scéniquement on retrouve d’ailleurs la verve de l’Elisir, les chanteurs sont
très sollicités dans les vocalises et les airs périlleux, certains exercices
sont extrêmement virtuoses, à la manière de Rossini. Les personnages sont
inspirés de la Commedia dell’arte.
Don Pasquale
n’avait jamais été joué à l’Opéra de Paris, il fait donc son entrée au
répertoire avec cette production très vive, très enjouée, esthétiquement
superbe et qui donne la part belle une interprétation moderne de cette comédie
aux thèmes pourtant très datés.
Le jeune
metteur en scène Italien Damiano Michieletto (42 ans) a beaucoup de talent pour
illustrer la comédie et mettre en relations décors, mouvements et musique.
C’est un vrai directeur d’acteurs et on ressent plaisir et jubilation à chacune
de ses trouvailles toujours remplies d’humour et très à propos. Son “Barbier de
Séville” donné déjà durant deux saisons de suite à Bastille en était une
évidente et talentueuse illustration.
Avec ce Don
Pasquale il réussit une très belle mise en scène, parfaitement adaptée à
l’opéra (l’oeuvre) et à l’opéra (Garnier, la salle) qui ne laisse pas un temps
mort aux chanteurs sans cesse sollicités pour leur plus grande joie
manifestement.
Car il faut
pour servir cette mise en scène, quelques génies du décor et de la vidéo,
quelques figurants doués et des chanteurs, ayant l’âge du rôle, et se montrant
tout autant virtuoses que bons acteurs.
Les décors
représentent une maison avec ses pièces et sa terrasse, mais sans
représentation physique des murs. Seules les portes sont représentées, ainsi
qu’une image en tubes néons du toit.
Acte 1 et 2: une
maison assez cheap, style années 60
(il y a du Hopper dans l’inspiration), vieux poële à charbon, canapé au design
suranné, lit étroit en bois, baignoire à pieds et bagnole vintage, tableau
suspendu d’un peintre oublié.
Acte 3 : la
même mais avec des accessoires de riches et les trouvailles remplies d'humour
du décorateur : tout s’est enrichi et modernisé (le poële a pris un design
actuel, la voiture est flambante et moderne, le lit s’est élargi etc etc.).
Je me
demandais à quel film ce décor me faisait penser, j'ai trouvé : Dogville de
Lars Von Trier, qui adopte le même principe de ces représentations de maisons
sans murs.
Le
déroulement de l’opéra est, de plus, enrichi par une très belle utilisation de la
vidéo et de l'incrustation des artistes dans des scènes projetées. Michieletto
fait du Van Hove, ce dernier étant l’un des plus doués utilisateurs de ce
procédé (Les Damnés à la Comédie Française), alors que ce dernier, qui met en
scène Boris Godounov au même moment à Bastille, n’a semble-t-il, pas eu le temps
de mettre au point son projet en la matière, du fait des incidents techniques
qui ont gelé l’utilisation du plateau pendant deux semaines. Dans Don Pasquale,
c’est drôle, efficace et démontre, en gros plans, l’incroyable talent des
chanteurs pour la comédie en direct... ce que l’on ne souligne pas assez
souvent à mon avis. Le même talent est requis pour les retransmission filmées
en direct et quand on pense aux nombre de prises souvent requise pour un film
classique, on ne peut que saluer la prise de risque et le talent de ceux et
celles qui sont aussi des chanteurs sans sonorisation.
Soulignons
aussi la jolie trouvaille des choeurs (de domestiques) chantant “Che interminabile andirivieni” à l’acte
3 tandis que des artistes manient des marionnettes à l’effigie des trois
personnages principaux.
Nadine Sierra en Norina est sublime, virevoltante, très en voix (malgré un ou deux aigus un peu tirés au début) et domine l’ensemble de ses vocalises avec insolence tout en ne restant jamais au même endroit ou immobile plus de quelques secondes à la fois. Elle a le physique et la santé pour le rôle, elle est jolie, élégante, gracieuse, émouvante, drôle, bref, on ne tarit pas d’éloges pour une prestation aussi éblouissante.
Florian Sempey est également un irrésistible Malatesta, un rien mafioso, tout en geste évocateurs pendant sa performance, en clins d’oeil appuyés et efficaces au public. Je l’ai trouvé en très net progrès sur les vocalises, voire ébouriffant dans son duo avec Don Pasquale à l’acte 3 (Cheti, Cheti). Petite réserve maintenue cependant sur ses graves qui restent trop peu timbrés, dommage).
Michele Pertusi est un Don Pasquale truculent à souhait, très en forme aussi et parfaitement adéquat au rôle du vieux barbon trompé. Il est flanqué dans la mise en scène, d’une sorte de gouvernante, qui fume beaucoup et sera finalement sa “bouée” de secours à la fin de l’opéra quand elle l’installe dans un fauteuil roulant dans sa vieille robe de chambre écossaise.
Nadine Sierra en Norina est sublime, virevoltante, très en voix (malgré un ou deux aigus un peu tirés au début) et domine l’ensemble de ses vocalises avec insolence tout en ne restant jamais au même endroit ou immobile plus de quelques secondes à la fois. Elle a le physique et la santé pour le rôle, elle est jolie, élégante, gracieuse, émouvante, drôle, bref, on ne tarit pas d’éloges pour une prestation aussi éblouissante.
Florian Sempey est également un irrésistible Malatesta, un rien mafioso, tout en geste évocateurs pendant sa performance, en clins d’oeil appuyés et efficaces au public. Je l’ai trouvé en très net progrès sur les vocalises, voire ébouriffant dans son duo avec Don Pasquale à l’acte 3 (Cheti, Cheti). Petite réserve maintenue cependant sur ses graves qui restent trop peu timbrés, dommage).
Michele Pertusi est un Don Pasquale truculent à souhait, très en forme aussi et parfaitement adéquat au rôle du vieux barbon trompé. Il est flanqué dans la mise en scène, d’une sorte de gouvernante, qui fume beaucoup et sera finalement sa “bouée” de secours à la fin de l’opéra quand elle l’installe dans un fauteuil roulant dans sa vieille robe de chambre écossaise.
Lawrence Brownlee
est vraiment surprenant, campant un Ernesto totalement inhabituel et
extrêmement convainquant, sorte d’adolescent attardé et rebelle (qui
peinturlure la belle bagnole de son oncle et se ballade avec un sweat orange
dont il tire la capuche sur sa tête régulièrement pour se cacher), belle interprétation
vocale, là aussi très juvénile et très amusante.
Mes réserves
principales iront à la direction de Pido un peu lente ; le chef est à son
habitude (dans Rossini notamment) un peu castrateur, coupant les chanteurs dans
leurs beaux élans virtuoses par une battue molle et interrompue un poil de
seconde avant l’apothéose (que c’est agaçant) mais la musique de Donizetti a eu
le dessus pour finir, comme d’ailleurs le talent de tous les artistes, choeurs
et orchestre compris.
Bref, on
s'amuuuuuuse beaucoup.
Même si la
fin manie un peu l'humour noir puisque, tandis qu’Ernesto fume un joint sur le
canapé, Norina et Malatesta s’embrassent dans la salle et Don Pasquale finit
sinistrement dans son fauteuil roulant...c’est grinçant, comme la fin d’une
farce qui ne peut pas vraiment rendre ses personnages heureux.
A noter :
Retransmission en direct au cinéma (Viva l’Opéra), le 19 juin 2018.
Pour en savoir plus sur Nadine Sierra
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